Le viaduc du Day et le lac du Miroir
Cet ouvrage construit en pierres par Bollini et Chiavazza de 1923 à 1924 enjambe le cours de l'Orbe et remplace un premier viaduc métallique construit de 1868 à 1869.
Notez que cet ouvrage vient d'être rénové pour onze millions de francs.
http://www.24heures.ch/vaud-regions/nord-vaudois-broye/viaduc-day-renove-11millions-francs/story/19298135
Après les derniers travaux de rénovation, le tablier du viaduc est plus large
Le premier viaduc fut édifié vers 1869 pour permettre l'arrivée à Vallorbe de la ligne Eclépens-Jougne en 1870.
Le tronçon permettant de rejoindre Pontarlier par Jougne fut terminé un peu plus tard, en 1875.
Ce tronçon a été abandonné en 1939, au début de la guerre, mais l'essentiel du trafic se faisait déjà par le tunnel du Mont d'Or ouvert en 1915.
L'ancien viaduc avec son tablier métallique en fonction de 1870 à 1925
Et voilà l'express de Paris qui arrive !
Au
moment de la reconstruction en pierre de ce viaduc, la Feuille d’Avis de
Lausanne du 19 octobre 1923 retrace l’histoire de l’ancien pont métallique.
« Lundi 15 octobre 1923 ont
commencé, au Day près Vallorbe, la construction du viaduc en pierre qui remplacera
le viaduc métallique sur lequel la ligne Paris-Lausanne franchit la vallée de l’Orbe.
C’est à l’entreprise Bollini et Chiavazza
à Baulmes qu’a été adjugé ce travail pour la somme de 883'863 fr.
On déviera tout d’abord le chemin
du Châtelard, puis on établira un double téléférage destiné à amener à pied d’œuvre
les matériaux pour la construction
proprement dite, qui se fera en pierres des carrières d’Arvel près de
Villeneuve. Le nouveau pont devra être terminé d’ici à quatorze mois sous peine
d’une amende de mille francs par semaine de retard. Le pont actuel est donc
condamné.
Retraçons en la biographie.
Le viaduc du Day est donc jeté par-dessus
les gorges de l’Orbe, à l’endroit où la Jougnenaz, qui descend du Suchet,
apporte à cette rivière le tribut de son eau. Le viaduc comprend deux culées
distantes de 161 m. L’une sur la rive droite, (côté Lausanne), l’autre sur la rive
gauche (côté Vallorbe) avec deux ouvertures et deux piles, une sur chaque rive.
Sa partie métallique est longue de 119 m.
Il comporte trois ouvertures ou
travées, l’une de 23 m 60 (côté Vallorbe), la seconde au centre de 56 m, la
troisième (côté Lausanne) de 36 m 50, le rail est à 56 m au-dessus de la
vallée.
Le viaduc a été construit de 1867 à
1869.
Les fondations et les piles par
Alazard, l’un des promoteurs et l’entrepreneur général à forfait de la ligne
Jougne-Eclépens. La partie métallique a été fournie et montée par l’usine de
Hautmont, (département du Nord, France). Les travaux ont été dirigé par E.
Tourneux, ingénieur en chef à Paris et Louis Delarageaz , ingénieur à Préverenges,
avec au début, la collaboration de H. Gusac-Roney, à La Sarraz, sous la surveillance
, comme représentant de l’Etat de Vaud, de Louis Gonin, ingénieur cantonal des
ponts et chaussées, représenté sur place par Auguste Perey à Lausanne désigné
comme ingénieur-adjoint de contrôle pour la ligne de Jougne. Le projet de
construction métallique date du 4 mars 1868 dû à Gustave Bridel (1827-1884)
ingénieur des arts et manufactures, alors directeur à Yverdon d’un atelier de
construction dont sont sortis la plupart des ponts métalliques de l’Ouest-Suisse.
Il fut soumis à l’examen de Jules Gaudard qui fit un certain nombre d’observations.
Les piles et les culées ont été
fondées sur bonne roche, du calcaire bleu dit de Purbeck. Le travail commença
le 12 septembre 1867. Dès le début on joua de malheur. Au bout de quelques mois
de travail on constata que la chaux utilisée était de mauvaise qualité ;
il fallut démolir les vingt premiers pieds de maçonnerie. Ce n’est que le 12
juin 1868 que l’on put recommencer avec de la chaux de première qualité cette
fois.
Dans le même mois de juin, on
commença la construction de la grande pile de la rive droite (côté Lausanne).
La pierre nécessaire était extraite des rochers voisins. Un temps très
favorable permit un travail ininterrompu. Le 31 octobre 1868 les deux piles
étaient achevées, ainsi que les culées de chaque rive. La maçonnerie représentait
au total 8’851 mètres cube et leur surface 812 mètres carrés.
Il s’agissait maintenant d’établir
et de lancer la construction métallique avec tablier supérieur. Arrivé de
Hautmont à Vallorbe au printemps 1869, en pièces détachées, elle fut montée sur
deux poutres principales continues, distantes de cinq mètres dans une tranchée
creusée côté Lausanne, dans le prolongement du pont ; elle exigea 347
tonnes de fer, de fonte et de plomb. Lorsque le montage fut terminé, le tablier
muni d’un avant-bec en bois fut lancé sur les piles à la fin d’août et au
commencement de septembre au moyen de vérins hydrauliques et de rouleaux. L’opération
faite en présence de nombreux curieux n’alla point sans encombre ; elle
subit de nombreux arrêts ; un certain nombre de détériorations fut
constatées.
Les 27 et 28 juin, le pont
subissait, en présence de M. Liardet, ingénieur de contrôle avec une surcharge
de quatre tonnes par mètres carré, les épreuves réglementaires. Le 1er
juillet 1870 il était mis en service. Il avait coûté 440’000 fr dont 255'880 fr.
pour la maçonnerie, 184'120 fr. pour la partie métallique. Comme tous les
ouvrages d’art de la ligne le pont avait été établi dès le début pour la double
voie, celle-ci ne fut posée qu’en 1905 ; jusqu’à ce moment-là l’espace du
pont resté libre servit de chemin public pour les piétons.
En 1891 après l’accident de Münchenstein,
le viaduc du Day fut l’objet d’un sérieux examen. Le 3 juillet un nouvel essai
en fut fait. Jules Gaudard présenta le rapport. La maison Fatio à Lausanne fut
chargée d’une inspection détaillée de toute la construction. Des doutes
apparurent au sujet de sa solidité ; on constata que le fer employé était
de mauvaise qualité. Il faut dire que lors de s construction les essais de
matériau étaient à leur début. En 1900 on procéda à son renforcement ; on
y consacra 100’00 fr. Le 1er décembre 1900 se firent les épreuves du
pont ainsi renforcé. Le renforcement a porté le poids de fer de 347 à 531
tonnes, dont 200 tonnes de matériel neuf.
Mais on avait constaté des défauts
de construction auxquels on ne pouvait remédier et que le pont avait atteint la
limite extrême de la charge admissible.
Aussi lorsque l’installation de la
traction électrique sur la ligne Lausanne-Vallorbe rendit nécessaire le
renforcement des ponts, on se convainquit bien vite de l’impossibilité d’un renforcement
et l’obligation de son remplacement par un nouveau viaduc.
Ce nouveau pont serait-il
métallique, en béton ou en pierre ?
C’est pour le pont en pierre qu'on
s’est décidé. Le prix de revient en est, il est vrai un peu plus cher, mais
cette différence est compensée par l’économie sur les frais d’entretien qui,
capitalisés représente 60'000 fr. et par le fait que les sommes dépensées pour
un pont de pierre restant dans le pays, alors que pour un pont métallique il
faudrait tirer de l’étranger au moins 800 tonnes de fer à 250 fr représentant
200'000 fr.
Un pont de pierre est ailleurs plus
durable qu’un pont métallique et s’accorde mieux avec le paysage. »
La galerie pour piétons du viaduc du Day
Cette galerie appréciée par tous les promeneurs de la région n'est pas arrivée par hasard.
Et la Feuille d'Avis de Lausanne du 10 septembre 1924 nous décrit l'histoire de sa création :
"On nous
écrit de Vallorbe :
Les personnes qui, à pied, se rendent à Ballaigues,
de la Jougne des Eterpaz, du Châtelard au Day et vice versa, doivent
actuellement faire le détour par Vallorbe; aucun pont, ni passerelle ne permet
de franchir au Day les gorges profondes de l’Orbe. C'est un détour qui représente
près de cinq kilomètres, plus d'une lieue.
A vrai dire, pendant un certain
nombre d'années, il en a été autrement. Le viaduc du Day, construit pour la
ligne Jougne- Eclépens, de 1867 à 1869, éprouvé les 29 et 30 juin 1870, fut
établi, comme tous les ouvrages d'art de la ligne, en vue de la double voie :
mais on ne posa d'abord que la voie d'aval. La moitié du pont restée libre a servi,
jusqu'à l'établissement de la double voie en 1904, à l'occasion de l'ouverture
à l’exploitation du tunnel du Simplon, de chemin public pour piétons. Sa
suppression, il y a vingt ans, fut regrettée, de tous.
A l'occasion de la reconstruction du pont,
commencée, le 13 octobre 1923, en vue de l'édification les autorités de. Ballaigues et de Vallorbe
se sont demandé s'il ne serait pas possible, d'entente avec les C.F.F., de
rétablir ce passage pour piétons, qui rendrait à la population de la contrée de
grands services. Les C.F.F. se sont prêtés de fort bonne, grâce, à cette
réalisation.
Entre eux et les communes de Vallorbe et de
Ballaigues, une entente est intervenue aux termes de quoi les C.F.F. aménagent, sous le tablier du
pont, une passerelle pour piétons, dont le coût, devisé à 13’000 fr., est
réparti de la façon suivante : C.F.F. et commune de Vallorbe, chacun 5’250 fr.;
commune de Ballaigues 2’500 fr.
Dans la
séance du 2 septembre dernier, le Conseil communal de Vallorbe a ratifié
l'entente. Pour faire comprendre la manière, dont cette intéressante passerelle
sera aménagée, nous rappellerons que le nouveau viaduc comporte, au centre,
jetée sur le lit de l'Orbe, une grande voûte, puis deux voûtes moins grandes,
l'une du côté de Vallorbe, l'autre du côté de Lausanne. La grande voûte
centrale est achevée ; les deux autres voûtes le seront prochainement. La voûte
centrale sera décintrée, puis les deux voûtes voisines achevées ; alors seront
construites, au-dessus des trois voûtes, toute une série rie voûtes
d'élargissement, qui, elles, supporteront le tablier de la voie. Ces voûtes
reposant sur les voûtes principales — comme, c'est le cas à Lausanne pour le
pont Chauderon-Montbenon, donnent à la construction un air plu» dégagé et plus
élégant : elles sont supportées par des piliers qui viennent s'appuyer sur les
voûtes principales, C'est dans ces piliers que sera aménagé un passage pour
piétons, large de 1 m. 50, long de 110 m. 43. Comme les piles anciennes sur
chaque rive ont été maintenues, la passerelle les franchira, en aval, en
encorbellement, en les contournant, et aboutira, du côté de Lausanne, à des
sentiers conduisant soit à la station du Day, soit à la route, et du côté rie
Vallorbe, à un autre sentier allant rejoindre la route. Ce passage, dont la
largeur permettra de circuler avec de petits véhicules, en
particulier avec des charrettes d'enfants, redeviendra le but favori des
promenades des Vallorbiers : il offre en outre une très jolie vue sur Vallorbe,
la Dent de Vaulion, le Crêt des Alouettes et sur les gorges de l'Orbe.
Il faut donc se féliciter de l'entente
intervenue. Le décintrement de la grande voûte centrale se fera le lundi 22
septembre prochain (1924)."
La transformation du viaduc du Day du 15 octobre 1923
à 1924
Cette
petite brochure dont le titre figure ci-dessus, nous donne de nombreuses indications et photos sur tous les
travaux qui vont permettre la transformation d’un viaduc métallique en un pont
de pierre.
Les
anciens piliers seront conservés et renforcés par des arches.
Pour les
édifier il faudra amener par train 6'200 m3 de roche des carrières de St. Triphon et
d’Arvel.
Quant au
ciment, 1350 tonnes seront fournies par les usines de Roche, Holderbank et
Baulmes.
Tous ces
travaux ont été effectués en vue de l’électrification de la ligne Eclépens –Vallorbe.
Ces travaux ont coûté fr. 917'500.-, un coût qui comprend 200'154 heures de travail payées à fr. 1.38 !
Le viaduc métallique de 1869
Le nouveau viaduc
Premiers échafaudages