mercredi 16 novembre 2011

Le viaduc du Day

Le viaduc du Day et le lac du Miroir


Cet ouvrage construit en pierres par Bollini et Chiavazza de 1923 à 1924 enjambe le cours de l'Orbe et remplace un premier viaduc métallique construit de 1868 à 1869.


Notez que cet ouvrage vient d'être rénové pour onze millions de francs.

http://www.24heures.ch/vaud-regions/nord-vaudois-broye/viaduc-day-renove-11millions-francs/story/19298135


Après les derniers  travaux de rénovation, le tablier du viaduc est plus large



Le premier viaduc fut édifié vers 1869 pour permettre l'arrivée à Vallorbe de la ligne Eclépens-Jougne en 1870.

Le tronçon permettant de rejoindre Pontarlier par Jougne fut terminé un peu plus tard, en 1875.
Ce tronçon a été abandonné en 1939, au début de la guerre, mais l'essentiel du trafic se faisait déjà par le tunnel du Mont d'Or ouvert en 1915.




L'ancien viaduc avec son tablier métallique en fonction de 1870 à 1925

Et voilà l'express de Paris qui arrive !




Au moment de la reconstruction en pierre de ce viaduc, la Feuille d’Avis de Lausanne du 19 octobre 1923 retrace l’histoire de l’ancien pont métallique.


« Lundi 15 octobre 1923 ont commencé, au Day près Vallorbe, la construction du viaduc en pierre qui remplacera le viaduc métallique sur lequel la ligne Paris-Lausanne franchit la vallée de l’Orbe.
C’est à l’entreprise Bollini et Chiavazza à Baulmes qu’a été adjugé ce travail pour la somme de 883'863 fr.
On déviera tout d’abord le chemin du Châtelard, puis on établira un double téléférage destiné à amener à pied d’œuvre les matériaux  pour la construction proprement dite, qui se fera en pierres des carrières d’Arvel près de Villeneuve. Le nouveau pont devra être terminé d’ici à quatorze mois sous peine d’une amende de mille francs par semaine de retard. Le pont actuel est donc condamné.
Retraçons en la biographie.
Le viaduc du Day est donc jeté par-dessus les gorges de l’Orbe, à l’endroit où la Jougnenaz, qui descend du Suchet, apporte à cette rivière le tribut de son eau. Le viaduc comprend deux culées distantes de 161 m. L’une sur la rive droite, (côté Lausanne), l’autre sur la rive gauche (côté Vallorbe) avec deux ouvertures et deux piles, une sur chaque rive. Sa partie métallique est longue de 119 m.
Il comporte trois ouvertures ou travées, l’une de 23 m 60 (côté Vallorbe), la seconde au centre de 56 m, la troisième (côté Lausanne) de 36 m 50, le rail est à 56 m au-dessus de la vallée.
Le viaduc a été construit de 1867 à 1869.
Les fondations et les piles par Alazard, l’un des promoteurs et l’entrepreneur général à forfait de la ligne Jougne-Eclépens. La partie métallique a été fournie et montée par l’usine de Hautmont, (département du Nord, France). Les travaux ont été dirigé par E. Tourneux, ingénieur en chef à Paris et Louis Delarageaz , ingénieur à Préverenges, avec au début, la collaboration de H. Gusac-Roney, à La Sarraz, sous la surveillance , comme représentant de l’Etat de Vaud, de Louis Gonin, ingénieur cantonal des ponts et chaussées, représenté sur place par Auguste Perey à Lausanne désigné comme ingénieur-adjoint de contrôle pour la ligne de Jougne. Le projet de construction métallique date du 4 mars 1868 dû à Gustave Bridel (1827-1884) ingénieur des arts et manufactures, alors directeur à Yverdon d’un atelier de construction dont sont sortis la plupart des ponts métalliques de l’Ouest-Suisse. Il fut soumis à l’examen de Jules Gaudard qui fit un certain nombre d’observations.
Les piles et les culées ont été fondées sur bonne roche, du calcaire bleu dit de Purbeck. Le travail commença le 12 septembre 1867. Dès le début on joua de malheur. Au bout de quelques mois de travail on constata que la chaux utilisée était de mauvaise qualité ; il fallut démolir les vingt premiers pieds de maçonnerie. Ce n’est que le 12 juin 1868 que l’on put recommencer avec de la chaux de première qualité cette fois.
Dans le même mois de juin, on commença la construction de la grande pile de la rive droite (côté Lausanne). La pierre nécessaire était extraite des rochers voisins. Un temps très favorable permit un travail ininterrompu. Le 31 octobre 1868 les deux piles étaient achevées, ainsi que les culées de chaque rive. La maçonnerie représentait au total 8’851 mètres cube et leur surface 812 mètres carrés.
Il s’agissait maintenant d’établir et de lancer la construction métallique avec tablier supérieur. Arrivé de Hautmont à Vallorbe au printemps 1869, en pièces détachées, elle fut montée sur deux poutres principales continues, distantes de cinq mètres dans une tranchée creusée côté Lausanne, dans le prolongement du pont ; elle exigea 347 tonnes de fer, de fonte et de plomb. Lorsque le montage fut terminé, le tablier muni d’un avant-bec en bois fut lancé sur les piles à la fin d’août et au commencement de septembre au moyen de vérins hydrauliques et de rouleaux. L’opération faite en présence de nombreux curieux n’alla point sans encombre ; elle subit de nombreux arrêts ; un certain nombre de détériorations fut constatées.
Les 27 et 28 juin, le pont subissait, en présence de M. Liardet, ingénieur de contrôle avec une surcharge de quatre tonnes par mètres carré, les épreuves réglementaires. Le 1er juillet 1870 il était mis en service. Il avait coûté 440’000 fr dont 255'880 fr. pour la maçonnerie, 184'120 fr. pour la partie métallique. Comme tous les ouvrages d’art de la ligne le pont avait été établi dès le début pour la double voie, celle-ci ne fut posée qu’en 1905 ; jusqu’à ce moment-là l’espace du pont resté libre servit de chemin public pour les piétons.
En 1891 après l’accident de Münchenstein, le viaduc du Day fut l’objet d’un sérieux examen. Le 3 juillet un nouvel essai en fut fait. Jules Gaudard présenta le rapport. La maison Fatio à Lausanne fut chargée d’une inspection détaillée de toute la construction. Des doutes apparurent au sujet de sa solidité ; on constata que le fer employé était de mauvaise qualité. Il faut dire que lors de s construction les essais de matériau étaient à leur début. En 1900 on procéda à son renforcement ; on y consacra 100’00 fr. Le 1er décembre 1900 se firent les épreuves du pont ainsi renforcé. Le renforcement a porté le poids de fer de 347 à 531 tonnes, dont 200 tonnes de matériel neuf.
Mais on avait constaté des défauts de construction auxquels on ne pouvait remédier et que le pont avait atteint la limite extrême de la charge admissible.
Aussi lorsque l’installation de la traction électrique sur la ligne Lausanne-Vallorbe rendit nécessaire le renforcement des ponts, on se convainquit bien vite de l’impossibilité d’un renforcement et l’obligation de son remplacement par un nouveau viaduc.
Ce nouveau pont serait-il métallique, en béton ou en pierre ?
C’est pour le pont en pierre qu'on s’est décidé. Le prix de revient en est, il est vrai un peu plus cher, mais cette différence est compensée par l’économie sur les frais d’entretien qui, capitalisés représente 60'000 fr. et par le fait que les sommes dépensées pour un pont de pierre restant dans le pays, alors que pour un pont métallique il faudrait tirer de l’étranger au moins 800 tonnes de fer à 250 fr représentant 200'000 fr.
Un pont de pierre est ailleurs plus durable qu’un pont métallique et s’accorde mieux avec le paysage. »



 La galerie pour piétons du viaduc du Day

Cette galerie appréciée par tous les promeneurs de la région n'est pas arrivée par hasard.
Et la Feuille d'Avis de Lausanne du 10 septembre 1924 nous décrit l'histoire de sa création :

"On nous écrit de Vallorbe :
Les personnes qui, à pied, se rendent à Ballaigues, de la Jougne des Eterpaz, du Châtelard au Day et vice versa, doivent actuellement faire le détour par Vallorbe; aucun pont, ni passerelle ne permet de franchir au Day les gorges profondes de l’Orbe. C'est un détour qui représente près de cinq kilomètres, plus d'une lieue. 
A vrai dire, pendant un certain nombre d'années, il en a été autrement. Le viaduc du Day, construit pour la ligne Jougne- Eclépens, de 1867 à 1869, éprouvé les 29 et 30 juin 1870, fut établi, comme tous les ouvrages d'art de la ligne, en vue de la double voie : mais on ne posa d'abord que la voie d'aval. La moitié du pont restée libre a servi, jusqu'à l'établissement de la double voie en 1904, à l'occasion de l'ouverture à l’exploitation du tunnel du Simplon, de chemin public pour piétons. Sa suppression, il y a vingt ans, fut regrettée, de tous.
A l'occasion de la reconstruction du pont, commencée, le 13 octobre 1923, en vue de l'édification  les autorités de. Ballaigues et de Vallorbe se sont demandé s'il ne serait pas possible, d'entente avec les C.F.F., de rétablir ce passage pour piétons, qui rendrait à la population de la contrée de grands services. Les C.F.F. se sont prêtés de fort bonne, grâce, à cette réalisation.
Entre eux et les communes de Vallorbe et de Ballaigues, une entente est intervenue aux termes de quoi  les C.F.F. aménagent, sous le tablier du pont, une passerelle pour piétons, dont le coût, devisé à 13’000 fr., est réparti de la façon suivante : C.F.F. et commune de Vallorbe, chacun 5’250 fr.; commune de Ballaigues  2’500 fr.
 Dans la séance du 2 septembre dernier, le Conseil communal de Vallorbe a ratifié l'entente. Pour faire comprendre la manière, dont cette intéressante passerelle sera aménagée, nous rappellerons que le nouveau viaduc comporte, au centre, jetée sur le lit de l'Orbe, une grande voûte, puis deux voûtes moins grandes, l'une du côté de Vallorbe, l'autre du côté de Lausanne. La grande voûte centrale est achevée ; les deux autres voûtes le seront prochainement. La voûte centrale sera décintrée, puis les deux voûtes voisines achevées ; alors seront construites, au-dessus des trois voûtes, toute une série rie voûtes d'élargissement, qui, elles, supporteront le tablier de la voie. Ces voûtes reposant sur les voûtes principales — comme, c'est le cas à Lausanne pour le pont Chauderon-Montbenon, donnent à la construction un air plu» dégagé et plus élégant : elles sont supportées par des piliers qui viennent s'appuyer sur les voûtes principales, C'est dans ces piliers que sera aménagé un passage pour piétons, large de 1 m. 50, long de 110 m. 43. Comme les piles anciennes sur chaque rive ont été maintenues, la passerelle les franchira, en aval, en encorbellement, en les contournant, et aboutira, du côté de Lausanne, à des sentiers conduisant soit à la station du Day, soit à la route, et du côté rie Vallorbe, à un autre sentier allant rejoindre la route. Ce passage, dont la largeur permettra  de  circuler avec de petits véhicules, en particulier avec des charrettes d'enfants, redeviendra le but favori des promenades des Vallorbiers : il offre en outre une très jolie vue sur Vallorbe, la Dent de Vaulion, le Crêt des Alouettes et sur les gorges de l'Orbe.
 Il faut donc se féliciter de l'entente intervenue. Le décintrement de la grande voûte centrale se fera le lundi 22 septembre prochain (1924)."


La transformation du viaduc du Day du 15 octobre 1923 à 1924


Cette petite brochure dont le titre figure ci-dessus, nous donne de nombreuses indications et photos sur tous les travaux qui vont permettre la transformation d’un viaduc métallique en un pont de pierre.

Les anciens piliers seront conservés et renforcés par des arches.
Pour les édifier il faudra amener par train 6'200 m3 de roche des carrières de St. Triphon et d’Arvel.
Quant au ciment, 1350 tonnes seront fournies par les usines de Roche, Holderbank et Baulmes.

Tous ces travaux ont été effectués en vue de l’électrification de la ligne Eclépens –Vallorbe.
Ces travaux ont coûté fr. 917'500.-, un coût qui comprend 200'154 heures de travail payées à fr. 1.38 !


Le viaduc métallique de 1869

Le nouveau viaduc




Premiers échafaudages













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