Le peintre Charles Clément à Arnex
Voici un article pour rappeler les peintures murales de l’église d’Arnex réalisées par Charles Clément lors de la restauration de l’église d'Arnex en 1922.
Le choeur de l'église de 1922 à 1959
Quelques habitants du village lui servent de modèle, ainsi les deux petites filles debout devant Jésus, sont Lucette Devenoge-Pilloud et sa sœur Hélène avec des tresses.
Et de chaque côté du chœur...
... des images de paraboles comme par exemple celle du bon samaritain :
Le bon samaritain
C'est également Charles Clément qui réalise le vitrail du chœur.
Mais au cours des ans les goûts artistiques se modifient et lors de la dernière restauration de 1959, toutes les peintures murales ont été enlevées pour faire apparaître le tuf de la voute.
Le chœur de l'église après la restauration de 1959 conduite par l'architecte Paul Lavenex.
Ainsi, après 37 ans toutes les peintures de Clément ont disparu.
Il ne reste que le vitrail
En 1924, Clément réalise également le vitrail de l'église d'Agiez sur le thème :
Ouvriers avec Dieu
Dans « Souvenirs d’un peintre » paru aux Editions du Verseau en 1963, Charles Clément nous parle de son passage à Arnex.
Dans cet ouvrage il cite aussi le centième anniversaire de Jacques Baudat (1823-1926) et fait le portrait des derniers tisserands du village.
Création des peintures murales de l’église en 1922
Charles Clément écrit :
« C’est peu après la fin de la guerre 14-18 que mes amis les architectes Gilliard et Godet me proposèrent de faire quelque décoration murale dans la toute petite église romane d’Arnex, et les gens du village avaient consenti à me laisser faire, conseillés du reste par un vieil homme dont je parlerai plus loin : le papa Morel, instituteur émérite. (Emile Morel 1852-1926, instituteur d’Arnex de 1897 à 1911)
Emile Morel et sa classe devant l’église vers 1903
Et ce monde bienveillant avait accepté comme sujet des Paraboles. Mais là où ils s’étaient montrés moins conformistes que d’autres, c’est qu’ils avaient admis que je représente les figurants des paroles évangéliques en tenue de paysans, tels ceux qui menaient leur vie dans le village.
Un jour de juin, nous étions arrivés à Arnex ; Pierre Monay m’accompagnait pour me donner un coup de main. Ce peintre, plus jeune que moi de dix ans, travaillait avec moi, et c’était le compagnon le plus agréable qu’on puisse rêver. On nous logea dans le nouveau collège qu’on venait d’inaugurer. (Le 30 octobre 1921)
Le lendemain nous étions sur place, au pied du mur. La petite église était en pleine restauration, sans portes ni fenêtres, encombrée de sacs de gravats, le chœur fermé d’une bâche. Quelques gens de métier bricolaient sans hâte excessive, un contremaitre tessinois les poursuivait de conseils inutiles.
On était adorablement bien dans notre petit local voûté, très peu élevé et qu’éclairait une seule fenêtre au fond du chœur, donnant en plein sur le cimetière rempli d’oiseaux, au centre du village.
Sur l’échafaudage qui courait le long des deux parois, face à face, nous tirions des traits à la ficelle plombée d’un bout à l’autre du petit local ; presque muets dans la paix monacale et la lumière fraiche qui chantait sur les murs. Seul, de temps à autre, le tic-tac d’une faucheuse qui longeait les murs de l’église accentuait encore le silence.
Par un trou de la bâche, Pierre me signalait discrètement l’entrée, dans la nef, de curieux, hommes ou femmes, la hotte au dos, retour des champs, et qui voulaient voir, signalés par le crissement de leurs souliers sur le gravat. Ils s’avançaient prudemment, le torse immobile, manœuvrant de la tête pour examiner les travaux accomplis. A voix basse, ils échangeaient quelques mots ; des croquis faits par moi sur la chaux du mur pour en éprouver l’enduit les intriguaient.
« Tu vois pas qu’ils ont fait ça pour rigoler »
Le plafond, tout neuf, leur faisait bonne impression par la qualité du bois, sans nœuds !
Plantés là, sans remuer, ils ne s’approchaient pas, ils ne nous voyaient pas, mais se méfiaient tout de même. D’autres venaient, la femme du tisserand, petite boulotte, avec une autre. « Ce sera rudement beau ces marques qu’ils font. »
Le maréchal, lui aussi, s’amenait depuis sa forge presque à côté. L’œil rond, avec de grandes moustaches, il admirait tout de confiance, soutenu par le pintier, gros blond ventripotent qui avait un bras en écharpe dont la main tenait un carré de linoléum, « rapport aux rhumatismes « .J’avais un public idéal.
Nous avions d’autres visiteurs, plus importants : ceux qui avaient leur mot à dire par le village. Le papa Morel, ancien instituteur, qui présidait le comité de restauration et avait soutenu le projet de décoration. C’était un beau vieillard, du type d’autrefois, à la Anker. Figure au profil fin et race avec des cheveux blancs bouclés ; lui venait nous voir en expert. De sa blouse grise, il tirait son étui à lunettes et suivait sur le mur, bout à bout, les figures esquissées en deux tons, terre de Sienne et noir, sur la chaux blanche qui jouait par place comme une aquarelle. I1 se déclarait d’accord et s’en allait comme il était venu.
L’ami Fréderic, (Frédéric Monnier 1883-1951) fils du syndic, venait, lui, nous chercher pour aller boire un verre à sa cave. Dragon vaudois aux moustaches blondes, yeux bleus, de cette espèce au crâne rond, gaulois attardé parmi nous, gai et rieur.
Il me plaisait particulièrement. II s’en remettait pour la peinture, faisant tourner la clé de cave par la ficelle au bout de son pouce gonflé de trayeur.
La séance s’achevait dans la cave profonde où le syndic ne tardait pas à venir nous rejoindre
« Vite un verre du nôtre, après on goûtera du tout bon. »
Souvent la dégustation se prolongeait plus que de raison, malgré les appels de Madame Frédéric trouvant qu’on en avait assez bu. »
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