vendredi 18 novembre 2011

Le phylloxéra dans nos vignes dès 1893

C'est vrai, de nos jours, les grandes craintes suscitées par l'arrivée, depuis les Etats Unis, de ce nouveau parasite sont un peu oubliées.


Dessins du phylloxéra

Il arrive en France en 1863, se présente à Genève en 1871.

Et en 1886, fait son apparition en terre vaudoise à Founex.
Mais déjà dès 1875, des mesures de surveillance sont prises.
Des commissions locales sont nommées, mais il semble que celle du village d'Arnex ne prit pas la chose très au sérieux.
Car en automne 1893, quand on découvre un très gros foyer dans le vignoble des Vaux,les experts appelés sur place estiment que l'origine de l'infection doit remonter à 7 ans au moins !


Chronique agricole du canton de Vaud du 10 septembre 1893 :
Arnex : Au moment où la campagne phylloxérique de 1893 semblait terminée, un nouvelle bien imprévue nous parvenait à la station viticole : celle de la découverte du phylloxéra à Arnex. C’est Monsieur Edouard Devenoge, membre nouvellement nommé de la Commission locale, qui a signalé le premier la vigne infestée et a rendu un très grand service à toute la contrée. Malgré les proportions très considérables prises déjà par la maladie, nous espérons en effet que des mesures énergiques réussiront à enrayer la marche du fléau et à préserver les vignes de la contrée qui sont encore indemnes à cette heure. Si l’invasion avait pu se propager pendant quelques années de plus sans être signalée, la position eût été presque désespérée ; comme la plupart des propriétaires atteints font aussi des vignes dans d’autres parchets, en particulier à Orbe, les chances de propagation du fléau devenaient toujours plus grandes.
La situation agricole est malheureusement déjà bien grave, comme on va en juger d’après les indications suivantes :
Dans le parchet qui est situé entre Arnex et la Sarraz, une zone d’environ 5 poses est plus ou moins contaminée. Cette zone renferme cinq foyers, plus de très nombreuses éclaboussures. Il y a des vignes entièrement prises ; d’autres présentent seulement quelques points phylloxérés.
On peut évaluer approximativement à 12'000 le nombre des souches atteintes par l’insecte. Vu la saison avancée et l’importance de l’infection, nous avons dû restreindre les recherches serrées, et nous borner à examiner d’une manière générale quelles sont les limites du territoire phylloxéré.
Les nodosités sont généralement moins fréquentes que dans les foyers de la Côte examinés en juillet-août, par contre les colonies de phylloxéra se trouvent avec une extraordinaire abondance sur les vieilles racines et jusqu’au collet des souches. On n’a pas trouvé d’insectes ailés ; les nymphes sont devenues assez rares, ce qui fait supposer que l’essaimage de 1893 s’est déjà produit en grande partie.
L’origine de l’infection du vignoble d’Arnex doit remonter à 7 ans au moins.
Les propriétaires atteints, au nombre de 42, pourront encore tirer parti de la récolte pendante. Il va sans dire que des précautions minutieuses de désinfection seront prises lors de la vendange.

Lausanne, le 8 septembre 1893                                                       
Station viticole
 
Il fallut très rapidement détruire 38'000 ceps au sulfure de carbone, soit environ deux hectares.
Mais le sulfure de carbone et les postes de désinfection n'empêchèrent pas la propagation du parasite.

Le 16 février 1894 est publié un arrêté cantonal concernant la désinfection des ouvriers et ouvrières venant travailler dans le vignoble vaudois. À la suite de cet arrêté, la Commune d’Orbe fait établir un poste de désinfection aux Joncs, qui n’a rien à envier à un poste de douane.
Jugez plutôt, il est dit :

Afin de prévenir la propagation du phylloxéra dans le vignoble d’Orbe depuis celui d’Arnex atteint de cette maladie l’année dernière.
1° Conformément à la décision prise par la Municipalité d’Orbe dans sa séance du 21 courant il est interdit à toute personne d’Arnex ou des autres communes du district d’Orbe, possédant ou travaillant des vignes à Arnex, de s’introduire ou de travailler dans le vignoble d’Orbe sans fournir la preuve qu’elle et ses outils ont été soigneusement désinfectés le même jour.

2° Un local de désinfection sera établi aux Joncs à la limite des territoires d’Arnex et d’Orbe. Les cartes délivrées dans ce local sont seules valables pour circuler dans le vignoble d’Orbe.

3° La quotte part des frais de désinfection sera supportée par les deux communes d’Orbe et d’Arnex suivant une proposition équitable qui sera déterminée par le Département de l’Agriculture et du Commerce.
Il sera demandé à l’Etat que ce poste de désinfection soit mis au même bénéfice que ceux mentionnés à l’article 9 de l’arrêté précité.

4° La commune d’Orbe est chargée de l’établissement, de l’organisation et de la surveillance de ce poste de désinfection.

5° Les contraventions aux mesures convenues seront punies conformément à l’article 12 de l’arrêté du 16 février 1894.
Adopté en séance de Municipalité le 27 mars 1894.

En septembre 1895, le Conseil d’État rappelle, aux communes touchées par ce fléau, les mesures suivantes pour les vendanges des vignes phylloxérées :
Vous voudrez bien fixer aux propriétaires intéressés les jours de vendange (au moins pour les abords immédiats des taches) et leur prescrire une désinfection complète des chaussures, fonds de brantes et seilles à la sortie. Cela sous votre surveillance. La vendange sera foulée sur place.

Ces mesures tiennent toujours en date du 16 avril 1898, comme le précise une décision municipale stipulant que l’ancien poste de désinfection des Vaux et un nouveau derrière la grange à François Bovet fonctionnent à partir du 28 avril 1898.

Le salut vint finalement du greffage de nos plants indigènes sur des porte-greffes américains, des plants qui ne sont pas sensibles aux piqures de l'insecte.

Ainsi grâce au greffage le vignoble  d'Arnex n'a pas diminué de surface.



 

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